Lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse (le 3 mai), tandis que les journalistes convergeaient vers la Colombie pour la célébration officielle des Nations Unies qui appelle à une plus grande unité pour la protection de leurs collègues et pour combattre l’impunité dont jouissent leurs agresseurs, un producteur de la radio […]
Lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse (le 3 mai), tandis que les journalistes convergeaient vers la Colombie pour la célébration officielle des Nations Unies qui appelle à une plus grande unité pour la protection de leurs collègues et pour combattre l’impunité dont jouissent leurs agresseurs, un producteur de la radio était abattu à Guatemala. Deux jours plus tard, c’était au tour d’un reporter brésilien d’être abattu.
Rolando López Sánchez, producteur général à Radio Sonora pendant 14 ans et co-producteur de l’émission politique quotidienne « Casos y Cosas de la Vida Nacional » [Cas et choses de la vie nationale], a été abattu par des inconnus dans un immeuble de la capitale, selon ce que rapporte le Centre des informations de presse sur le Guatemala (Centro de Reportes Informativos sobre Guatemala, CERIGUA). Le CERIGUA a déclaré que rien n’a été dérobé sur lui, ce qui porte l’organisation à croire que le meurtre de López est relié à son travail.
Dans une déclaration publiée à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le Comité sur la liberté de la presse de l’Association des journalistes du Guatemala (Comisión de Libertad de Prensa de la Asociación de Periodistas de Guatemala, APG) déplore la violence : « En ce jour, alors que nous devrions célébrer l’existence d’un droit fondamental, nous devons plutôt pleurer la perte irréparable d’un grand nombre de nos collègues en Amérique latine et dans le reste du monde. »
D’après l’APG, on a recensé 89 violations de la liberté d’expression au Guatemala en 2006, soit plus du double de l’année précédente. L’APG attribue l’augmentation au sale travail des « poderes paralelos », ou « pouvoirs parallèles » – les gangs ou groupes qui opèrent hors la loi, parfois avec l’appui des gouvernements – qui « se découpent des territoires où règne l’impunité et où ils imposent la loi qui veut que ‘ceux qui ont des armes sont les maîtres’ ».
Par ailleurs, le journaliste brésilien Luiz Carlos Barbon Filho a été tué le 5 mai par des hommes armés circulant à motocyclette tandis qu’il était assis à un bar dans l’État méridional de São Paulo, selon ce que rapportent la Société interaméricaine de la presse (SIP) et l’Institut pour la presse et la société (Instituto Prensa y Sociedad, IPYS). Barbon était chroniqueur aux quotidiens locaux « Jornal do Porto » et « JC Regional », et collaborateur à la station de radio locale Rádio Porto FM. Il était connu pour ses reportages d’enquête qui mettaient à nu la corruption politique, notamment son exposé en 2003 d’un réseau de prostitution infantile, qui a entraîné l’arrestation et la condamnation de quatre hommes d’affaires et de cinq politiciens locaux, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Ailleurs en Amérique latine, faisant mentir la tendance à l’impunité, des tueurs de journalistes ont été traduits en justice en République dominicaine. Reporters sans frontières (RSF) et le CPJ rapportent que Edri Vladimir « Vla » Pujols, membre du gang « Los Sayayines », a été condamné le 2 mai à 30 ans de prison pour le meurtre, en 2004, de Juan Andújar, correspondant du quotidien « Listín Diario ». Les nouvelles locales indiquent que l’attentat est survenu quelques minutes après qu’Andújar eut fait un reportage sur un crime sanglant opposant les membres d’un gang et des policiers à Azua.
Pujols a en outre été condamné à verser 1,3 million de pesos (40 310 $ US) au reporter de la radio Jorge Luis Sención, dit RSF. Sención a été amputé d’un bras après avoir été attaqué par Pujols parce qu’il avait été témoin du meurtre d’Andújar. Le CPJ rapporte qu’un autre membre du gang, Juan Ricardo Muños Herrera, a été condamné à cinq ans de prison pour complot, et qu’un troisième membre du gang, Maikel Bienvenido Agramonte, n’avait pas encore subi son procès parce qu’il était mineur au moment du crime. Son affaire sera déférée à un tribunal local pour mineurs.
La condamnation de Pujols est inhabituelle. D’après la recherche du CPJ, les tueurs de journalistes sont inculpés dans moins de 15 pour 100 des cas. « Nous espérons que la poursuite montre aux gouvernements que l’impunité ne doit pas l’emporter », dit le CPJ.
Pour affronter cette augmentation spectaculaire du nombre des violations de la liberté de la presse en Amérique latine, l’APG demande instamment davantage d’unité parmi les journalistes ainsi que la construction d’une alliance jouissant d’une base étendue avec d’autres organisations de la société civile, l’État et la communauté internationale. Les membres de l’IFEX travaillent en ce moment à mettre au point une stratégie de soutien pour la région. Pour plus de renseignements sur la campagne contre les « poderes paralelos », envoyer un courriel au Programme des campagnes de l’IFEX à : campaigns[@]ifex[.]org.
Consulter les sites suivants :
– CERIGUA, sur López : http://tinyurl.com/2k7jjp
– APG : http://ifex.org/en/content/view/full/83153/
– SIP : http://www.sipiapa.com
– IPYS, sur Barbon : http://tinyurl.com/2uro54
– CPJ, sur Barbon : http://tinyurl.com/2q6zy7
– CPJ, sur Pujols : http://tinyurl.com/35jybl
– RSF, sur Pujols : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=11410
(Photo : Association Mondiale des Journaux)
(8 mai 2007)