(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF daté du 30 décembre 2008: Liberté de la presse : l’année 2008 en chiffres Un mauvais climat, mais de meilleurs chiffres ; la répression se déplace sur Internet En 2008 : 60 journalistes tués 1 collaborateur des médias tué 673 journalistes arrêtés 929 agressés ou menacés […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF daté du 30 décembre 2008:
Liberté de la presse : l’année 2008 en chiffres
Un mauvais climat, mais de meilleurs chiffres ; la répression se déplace sur Internet
En 2008 :
60 journalistes tués
1 collaborateur des médias tué
673 journalistes arrêtés
929 agressés ou menacés
353 médias censurés
29 journalistes enlevés
Et concernant Internet :
1 blogueur tué
59 blogueurs interpellés
45 blogueurs agressés
1740 sites d’information fermés ou suspendus
A titre de comparaison, en 2007 :
86 journalistes tués
20 collaborateurs des médias tués
887 journalistes interpellés
67 journalistes enlevés
1511 agressés ou menacés
528 médias censurés
Reporters sans frontières a pris en compte les cas où le lien entre la profession de la victime et l’incident est soit établi, soit hautement probable. Les chiffres indiqués recensent les épisodes dont l’organisation a eu connaissance, ce qui ne prend pas en compte ceux pour lesquels les victimes ont volontairement gardé le secret, souvent pour protéger leur sécurité. Pour autant, le bilan présenté pour l’année 2008 est fondé sur la même méthodologie que les années précédentes, rendant possible une comparaison.
Vue générale
Les zones Asie-Pacifique et Maghreb-Moyen Orient sont toujours les plus meurtrières pour la presse. Après l’Irak (15 tués), le Pakistan (7 tués) et les Philippines (6 tués) sont les deux pays où les journalistes ont le plus perdu la vie cette année. L’hécatombe se poursuit au Mexique, où 4 journalistes ont été assassinés pour des raisons professionnelles. La baisse du nombre de morts en Afrique (3 en 2008, 12 en 2007) s’explique surtout par le renoncement de nombreux professionnels à exercer leur métier, prenant souvent le chemin de l’exil, ainsi que par la disparition progressive des médias en zones de conflit (en Somalie, notamment).
Les arrestations ou interpellations (au-delà de 48 heures de privation de liberté) sont particulièrement élevées en Afrique, où les commissariats sont un lieu de passage obligé pour de nombreux reporters ayant « dérangé » les gouvernements en place et franchi leurs lignes rouges. En Irak (31 arrestations), l’armée américaine continue de gérer la situation sécuritaire en faisant parfois incarcérer les collaborateurs de médias étrangers ou les journalistes locaux. En Chine (38 arrestations), l’année olympique a servi de prétexte pour de nombreuses incarcérations. En Birmanie (17 arrestations), le raidissement de la junte a été payé de leur liberté par de nombreux journalistes ou blogueurs critiques.
Réaction de Reporters sans frontières :
« Les chiffres sont certes moins élevés que l’année précédente, mais cette baisse masque mal une généralisation de l’intimidation et de la censure, y compris en Occident, ainsi qu’un raidissement des gouvernements les plus autoritaires. Si certaines situations se sont effectivement améliorées quantitativement, cela est parfois dû au découragement des journalistes eux-mêmes, qui prennent le chemin de l’exil ou renoncent à leur métier. Dans ce contexte, nous ne pouvons pas dire qu’une soixantaine d’assassinats, des arrestations par centaines et des actes de censure généralisés soient un motif d’optimisme. »
La répression se déplace sur Internet
L’année 2008 a connu moins de journalistes des médias traditionnels tués ou arrêtés. Mais la situation de la liberté de la presse dans le monde ne s’est pas améliorée pour autant : désormais, à mesure que la presse écrite et audiovisuelle se transforme et que la blogosphère prend une envergure mondiale, la prédation s’exerce sur Internet.
A cet égard, les chiffres sont parlants. Pour la première fois, un homme a été tué en 2008, alors qu’il effectuait un travail de « journalisme citoyen » : l’entrepreneur chinois Wei Wenhua a été battu à mort par des officiers municipaux (« chengguan »), le 7 janvier, après qu’il avait filmé une altercation avec des manifestants dans la ville de Tianmen (province du Hubei). Des actes de censure sur le Web ont été recensés dans trente-sept pays, notamment en Chine (93 sites censurés), en Syrie (162 sites censurés) en Iran (38 sites censurés). Mais les démocraties ne sont pas en reste, en ce qui concerne la surveillance et la répression du Net : en Thaïlande ou en Turquie, les tabous du roi ou de l’armée sont si tenaces que la police surveille et punit de plus en plus les utilisateurs indélicats du cyberespace. Les sites de partage de vidéos, comme Youtube ou Dailymotion, ont été particulièrement visés par les censeurs officiels. Blocages ou filtrages sont de plus en plus courants, dès lors que l’un des contenus est jugé « offensant » pour telle ou telle autorité.
Cette réaction épidermique de certains gouvernements envers les sites « collectifs » commence à entraîner des phénomènes de « censure de masse », notamment des réseaux sociaux. La censure d’un site comme Twitter (en Syrie) ou Facebook (bloqué en Syrie et en Tunisie, filtré en Turquie et aux Emirats arabes unis) entraîne une cascade de blocages qui, s’ils étaient ajoutés aux mesures de contrôles habituelles, multiplieraient le résultat par dix.
La prison est, enfin, la réponse de plus en plus souvent apportée par les gouvernements aux critiques formulées dans les blogs. Dix cyberdissidents ont été arrêtés en Chine, 31 ont été agressés ou menacés, au moins trois condamnés par la justice. En Iran, Reporters sans frontières a recensé dix-huit arrestations, 31 agressions et dix condamnations. En Syrie (8 arrestations, 3 condamnations), en Egypte (6 arrestations) ou au Maroc (2 arrestations, 2 condamnations), la libre expression sur Internet est très problématique. La machine à broyer la liberté d’Internet a été particulièrement sévère en Birmanie, où la junte a fait condamner, dans des conditions honteuses, le blogueur et comédien Zarganar et le jeune cyberdissident Nay Phone Latt à des peines de prison incroyablement lourdes (59 ans pour le premier, 20 ans pour le second). Ces deux hommes ont rejoint les nombreux autres prisonniers politiques birmans, dont 16 journalistes.
Réaction de Reporters sans frontières :
« L’accroissement de l’influence et des potentialités d’Internet s’accompagne d’une plus grande vigilance de certains gouvernements, aux tendance sécuritaires déjà fortes. Les pays répressifs se dotent chaque année de nouveaux outils, permettant le traçage des données et la surveillance du Réseau. Ce dernier devient peu à peu le champ de bataille des citoyens au regard critique ou des journalistes censurés, et à ce titre représente une menace pour les puissants, habitués à gouverner selon leur bon vouloir et dans l’impunité. »
Lire le rapport intégral: http://www.rsf.org/article.php3?id_article=29793